samedi 16 mai 2020

Mes deux journées de rentrée post-confinement


         Jeudi 14 mai, réveil à six heures trente, câlins nez contre truffe rose humide avec Lutin, ma douce beauté toute blanche, avant de sortir du lit. Appui sur le bouton de la cafetière préparée la veille, rituel du nourrissage de mes félins, premier mug de café, lit fait et mis en position canapé, salle de bains, habillage, chaussage, repas froid déposé dans ma lunch box isotherme, deuxième mug accompagné d’une part de gâteau fait maison, rangement de l’ordi dans sa mallette de transport, démarrage de la voiture, trajet sur des routes vides, arrivée à l’école.

         Je n’ai pas de groupe d’élèves attitré ; pour l’inspection je suis là en renfort, une nouvelle mission me sera donnée lundi 18 mai au matin. Les élèves (25 au total) arrivent de façon échelonnée. Pendant que les enseignants les accueillent à la grille, je me poste au niveau des toilettes pour leur faire respecter la distance d’un mètre, je veille à ce qu’ils se lavent correctement les mains, ce qu’ils font tous merveilleusement. Je les félicite les uns après les autres, ils sont très doués !

Ah oui j’ai mis un masque dès mon entrée dans les locaux, chaque enseignant en a deux à disposition pour la journée, ainsi qu’une visière que je m’abstiens de porter, ce n’est pas obligatoire.

Le directeur n’a pas besoin de mon aide alors je vais boire un café (celui que j’ai apporté dans ma thermos) en salle des maîtres, j’ouvre mon ordi, je lis mes mails perso et mes mails pro.

Comme les entrées et les sorties, les récréations sont elles aussi échelonnées. J’occupe consciencieusement le poste stratégique des toilettes, je relaie les collègues qui ont besoin de faire une pause pipi ou une pause clope, je surveille les enfants dans la cour, j’observe leur façon de jouer. Bien éloignés les uns des autres, ils ont l’air de s’amuser malgré les contraintes.

         Nouveau passage aux toilettes avant de remonter en classe (elles sont toutes au premier étage) puis je retourne en salle des maîtres, les collègues se gèrent tous seuls, le directeur aussi…

         Déjeuner en commun à distance respectable, je suis la seule à consommer un repas froid. Les autres ont réchauffé leur plat au micro-ondes, pourtant c’est écrit noir sur blanc dans le protocole : « Proscrire l’utilisation de micro-ondes collectifs ». Je ne dis rien, pas envie de jouer la rabat-joie et de semer le doute, je mastique mon sandwich au pâté de lapin dans une ambiance paisible, détendue.

         L’après-midi, branle-bas de combat. Je demande au directeur la clé de la réserve de sport et j’installe dans la cour un parcours gymnique à base de plots, de cerceaux et de cordes. Au cours des trois récréations successives, j’encadre les élèves volontaires (ils sont tous volontaires) pour effectuer le parcours ; ils ne doivent pas toucher au matériel avec leurs mains (heureusement il leur reste leurs pieds). Tout le monde est content des exercices physiques proposés, je me sens satisfaite et utile à la société.

         Vendredi 15 mai, même assiduité aux toilettes le matin à l’arrivée des enfants. Il n’y a plus d’essuie-mains dans le distributeur alors je cours en chercher, puis je propose au collègue remplaçant (qui a en charge six élèves, trois CE1 et trois CE2) de lui apporter mon aide, notamment auprès d’Anaëlle, en CE1B, dont je connais les difficultés, ayant effectué trois semaines de remplacement dans sa classe, cette salle-là justement où nous sommes installés. Lire au sujet de cette fameuse classe mon post précédent Mes deux journées de pré-rentrée.

Je resterai là toute la journée, m’occupant, outre d’Anaëlle, du travail des deux autres élèves de CE1B : Morgan (un garçon) et Julia, pendant que mon collègue fait cours aux CE2.

         Pendant la pause-déjeuner, je proposerai au directeur de photocopier pour son école la fiche pédagogique envoyée par l’inspection, proposant « des idées pour des récréations en respectant la distanciation sociale ». Il me remerciera chaleureusement, le plaisir est pour moi, le partage est dans ma philosophie.

         J’installerai pour les récrés de l’aprèm un parcours sportif différent de la veille, avec toujours le même matériel basique, pour la plus grande joie des enfants (du CP au CM2), de leur maître ou de leur maîtresse.

Lundi 18 mai, eh bien j’irai là où l’on me demandera d’aller, je sais m’adapter, je ne suis pas à cours de ressources, j’aime mon nouveau métier.