mercredi 13 mai 2020

Mes deux journées de pré-rentrée


Passage express lundi matin à mon école de rattachement, le temps de revoir (de loin) mes collègues, de m’affubler d’un masque à usage unique qui n’a pas tardé à m’embarrasser car j’ai eu envie d’un café, et la secrétaire de l’inspection m’appelait pour me donner mon affectation pour la semaine a-t-elle précisé.

J’ai fini tranquillement ma tasse puis j’ai repris ma voiture pour me rendre à l’école élémentaire de la petite ville d’à côté, celle où j’avais effectué un remplacement de trois semaines dans la fameuse classe de CE1B où les enfants tombaient malades comme des mouches, terrassés par ce qu’à l’époque (fin janvier début février) on appelait une forte grippe.

Durant cette période, il n’y a pas eu un jour où j’ai travaillé avec la classe entière. Certains arrivaient le matin avec une petite mine et repartaient chez eux le midi après appel à leurs parents parce qu’ils s’étaient écroulés sur leur table, parce qu’ils toussaient, parce qu’ils avaient mal au ventre, parce qu’ils avaient vomi, parce que leur température dépassait les 38°C.

Les premiers signes sont apparus pour moi le mercredi avec un mal de gorge ; le jeudi j’ai eu mal à la tête, des courbatures et mon système respiratoire a commencé à s’encombrer ; le vendredi (dernier jour de classe avant les vacances) je me suis réveillée avec une forte fièvre mais j’ai décidé d’aller quand même à l’école car je ne voulais pas être délestée d’un jour de carence.

À la récré de dix heures j’ai pris rendez-vous avec mon médecin traitant, au cours de la journée j’ai clôturé mon remplacement (corrections, mise en ordre du cahier-journal, rangement de mes affaires…), avec les élèves présents on a fait des jeux de société et un goûter l’après-midi mais je n’en menais pas large…

Rentrant chez moi je me suis mise au lit frigorifiée et tremblotante avec 38,9°C au thermomètre, à dix-neuf heures dix j’étais chez le médecin qui, après m’avoir examinée et déclaré que ce n’était pas la grippe, m’a prescrit du Doliprane, du pschitt pschitt pour le nez, du sirop et du repos.

Bonjour le début des vacances d’hiver. Le samedi j’ai dormi, le dimanche j’ai dormi, le lundi j’ai préparé mes affaires pour mon départ dans le Jura avec ma mère, le mardi on est parties, dans la nuit je n’ai pas cessé de tousser, le mercredi matin j’ai pris rendez-vous chez le médecin de la station qui m’a donné des antibiotiques, j’ai dormi tout l’après-midi et encore toute la nuit, le jeudi je n’étais pas plus vaillante…

Je n’ai pas fait de ski m’en sentant tout bonnement incapable, juste une balade en raquettes le vendredi après-midi et de courtes promenades. Avec ma mère nous avons visité les musées des alentours, elle préparait de bons petits plats midi et soir, je n’avais pas trop d’appétit mais je n’ai pas souffert d’une perte de goût, tant mieux.

De retour à mon domicile, poursuivant le traitement antibiotique, je n’ai fait que dormir, encore et encore, ainsi j’étais fraîche et dispose pour retourner au travail le lundi 24 février au matin. C’est alors que le virus, qui jusqu’alors se limitait à faire des dégâts en Chine, s’est imposé en Europe de façon bien réelle.

Voilà toute l’histoire. Depuis j’ai revu mon médecin traitant qui n’exclut pas que j’ai été frappée d’une forme particulière du Covid-19, comme de nombreuses autres personnes début 2020.

Lundi 11 mai, donc, réunion de l’équipe enseignante, chacun-e dans un coin de la classe avec un masque à usage unique sur le visage, son gel hydroalcoolique personnel à portée de main puisque les flacons promis par l’administration n’avaient pas encore été livrés (mardi soir il n’y en avait toujours pas), point sur les enfants qui seraient présents dès jeudi 14 mai et ceux qui ne reprendraient la classe que mardi 2 juin, passage de l’infirmière pour répondre aux questions et évaluer le respect du protocole sanitaire (loin d’être au top), encadrement des huit enfants de soignants occupant la salle attribuée au centre de loisirs pour permettre aux enseignant-es de l’école de préparer leur classe, de repenser l’espace, de condamner l’accès au matériel pédagogique collectif (bibliothèque, jeux de société, outils de géométrie…).

Mardi 12 mai, comme le nombre d’enfants du personnel prioritaire est monté à treize, il a fallu faire deux groupes dans deux endroits différents. J’ai encadré les cinq élèves de maternelle dans la salle du centre de loisirs en compagnie d’une ATSEM : Marianne le matin, Martine l’après-midi.

Nous avons expérimenté l’application du protocole, une place attitrée à chacun-e sur une table pour le travail de classe et autres activités éducatives, leur manteau déposé sur le dossier de leur chaise, un lavage des mains régulier, le portage du masque en permanence pour les adultes (je ne me serais pas crue capable de le supporter pourtant je l’ai fait et a priori ça ne gênait pas plus que ça les enfants), par contre pour le jouet personnel il faudra repasser, pour la récré sans rien à manipuler c’est pareil, les petits ne sont pas à cours d’idées pour s’amuser avec des fleurs cueillies dans la pelouse ou des pommes de pin ramassées sous les arbres…

J’ai installé dans la cour un parcours sportif avec des plots et des cerceaux auxquels les enfants n’avaient pas le droit de toucher, ça a très bien marché, ils étaient très contents de pouvoir sauter, courir, contourner, slalomer…

Jeudi 14 mai ce sera une autre paire de manches mais Cool Raoul on n’est pressé de rien, on n’a pas le bac à leur faire passer, juste une rentrée des classes extraordinaire à prendre comme telle, avec sérieux, certes, mais humour aussi ; enfin c’est ce que je compte faire.

Quand même, pour finir, un des collègues de l’école l’a attrapé, le coronavirus, et heureusement pour lui, il s’en est bien sorti.