Bruits secs et sourds, crépitements. Sons
élastiques, rebondissants. Les coups redoublent, montent en puissance. Violence
immense, colère lâchée, vieilles souffrances.
Clappements, clapotis, clapotements. Pluie
rageuse, lourdes gouttes tombant en rangs serrés, senteurs de terre. Longues
minutes tambourinées : des trombes, des seaux, des cordes !
Voilà que ça se calme, ça va decrescendo, puis ça
s’arrête. Les arbres se secouent, la terre étanche sa soif. Absorption,
écoulements, glissements, goutte-à-goutte.
Allongée sur le dos, les yeux fermés, je me
rassemble, reprends conscience. J’ouvre les yeux : dôme d’une grotte aux parois
arrondies. Ventre maternel, placentaire, matriciel. Béatitude, douce euphorie.
Il fait bon, sous la tente. Je m'y sens bien.
Étanche et rassurante, chaleur diffuse dans le duvet. Son souffle régulier se
mêle au mien. Ancré dans le sommeil, il m’enlace. Il m’appartient, je suis à
lui.
Depuis la nuit des temps je l’aime. Sentiment
étrange, ancestral, primitif. Rester comme ça entre deux eaux, laisser divaguer
mes pensées, sa main bien chaude sur ma peau nue.
Il bouge, il gémit, se retourne. Sa main me
quitte, il se replie, se met en boule. Je change de position, me lovant contre
lui. Poitrine collée à son dos, je l’entoure de mes bras.
Je laisse aller ma tête contre la sienne. Je le
respire tout entier, je l’appréhende dans ses moindres détails. J’écoute son
corps vibrer. Affinités, intimité, sérénité.
Chaque journée commencée en sa compagnie me
remplit d’aise. Je suis fière, nous sommes ensemble. C’est l’été, les vacances,
pas de contraintes, itinérance…
Là, maintenant : je prends, je glane, je
passe en fraude, je louvoie, je maraude.
Langueur, lascivité, paresse. Lueurs de l’aube, jour nouveau, seuls au monde.
Il s’étire, se détend. Il se tourne vers moi,
ouvre les yeux, les referme. Il les rouvre, me sourit, approche ses lèvres des
miennes, il m’embrasse. Illumination, foudroiement, éclairs.
Un flot de désir me submerge et m’entraîne loin
du large, vers des terres inconnues, en friches.
Temps houleux, vent violent, je perds pied, je
suffoque.
Je me laisse assaillir, envahir, engloutir,
posséder.
Plus rien d’autre ne compte.