Vous posez tous les trois sur la photo.
Parfaitement immobiles, vos yeux tournés vers l’objectif qui vous a
immortalisés. Un instant rare, précieux, privilégié. Derrière vous, la maison.
Votre maison, celle où vous avez vécu en paix au
cours de toutes ces belles années… On voit le bas de la porte et ses volets en
bois, le perron gris, le crépi blanc de la façade. Au premier plan, les herbes
folles de la pelouse.
Elle se tient droite sur la terrasse. Rayonnant
de grâce, irradiant de beauté. C’est elle la plus âgée ! Son regard est
empreint de douceur et de sérénité. Elle est fière et altière, les yeux
mi-clos, la mine confiante, pleine de malice.
La plus jeune est assise sagement sur la première
marche. Pour une fois qu’elle se tient tranquille ! Elle est tellement
mignonne, gentille et délicate… Elle exprime tout l’amour du monde, avec
candeur et insouciance.
Toi, tu te trouves à l’autre bout du petit
escalier. Tu sembles inquiet, nerveux, sur la défensive, comme à ton habitude.
Tu lances des éclairs noirs, la colère n’est pas loin ! Tu fais tout de
même un effort pour paraître agréable.
J’ai retrouvé la photo quand la plus jeune est
morte, fauchée bêtement par une voiture, un jour pas fait comme un autre. Je
l’ai faite encadrer quand la plus âgée, malade, devenue maigre et fragile, a
rendu son dernier souffle.
Elle est accrochée là, devant moi, bien visible,
sur le mur du salon. Toi, tu résistes au temps qui passe. Ombrageux, ténébreux,
toujours fuyant, rarement confiant, malgré toute l’affection que je te porte.
Tu es le dernier des trois, le seul qu’il me
reste, le prochain sur la liste.
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